Remonter Editorial Les Amis De l'IFEER Formations Pédagogie Bibliographie Sessions de L'IFER Presse Notes de lecture Nos Sites Favoris Glossaire des termes

Saint Paul


 

 

Remonter

 


        

 

Première  partie : 

                 Le schéma traditionnel de la naissance du christianisme nous a souvent été présenté comme une évolution harmonieuse et merveilleuse. Dès la Pentecôte, les apôtres reçoivent l’esprit saint et se lancent aussitôt avec courage dans l’aventure missionnaire. Ils se partagent les tâches dans la complémentarité, Pierre évangélise les Juifs ,et Paul les païens. Beaucoup de difficultés sont gommées pour présenter une légende assez dorée.

                 La réalité à laquelle arrive la recherche est souvent assez différente. Au tout début, il n’y a pas d’idée de mission, Jésus n’a pas d’intention de fondation de communauté. Jésus attend l’arrivée imminente du Royaume de Dieu, Paul attend l’arrivée non moins imminente de la Parousie, le retour triomphant de Jésus-Christ pour installer ce royaume de Dieu tant attendu.

                  L’idée de mission se construit progressivement, sans plan. Ce sont les Hellénistes persécutés dès 33, qui dans leur exil deviennent missionnaires(1). Pierre et Paul n’ont pas été les tous premiers. Ce qu’on appellera plus tard le christianisme n’est pour l’heure qu’une tendance à l’intérieur d’un judaïsme multiforme, ce christianisme primitif n’est pas uni, des conceptions assez différentes s’affrontent. On doit le rappeler, il y a eu des christianismes primitifs.

                   C’est dans ce cadre complexe que nous allons aborder la grande aventure que fut  la vie de Paul. Les sources à notre disposition, les Actes des Apôtres et ses propres écrits, les épîtres, nous permettent-ils d’accéder aux grandes phases de son itinéraire ? Certes, on s’en doute, il est illusoire de prétendre à une biographie précise aussi bien pour Jésus que pour lui, tellement nos sources sont incomplètes et à registre plus théologique qu’historique. Mais, néanmoins, la recherche  tente de dégager quelques aspects principaux de sa vie, de poser des problèmes et des réflexions nouvelles  sur cette grande figure de la  naissance du christianisme.

 

 

I-                   LES  DEBUTS

 

1-      Qui est Paul ?, ses origines.

a-      De nombreux renseignements sur sa vie sont à notre disposition grâce aux Actes des Apôtres        ( rédigés par Luc ?, dans les années 80) et à la correspondance de Paul lui-même ( sur 13 lettres conservées, 7 certainement de lui, remontent aux années 50 et constituent les plus anciens textes du Nouveau Testament, les autres sont de ses disciples et donc d’une génération postérieure, des années 80 peut-être).Ces matériaux constituent une documentation exceptionnelle dont nous ne disposons pas hélas pour d’autres personnages de cette époque. Cependant, les données biographiques issues de ces documents ne sont pas toujours compatibles, la chronologie est assez incertaine, et rares sont les dates repères sûres. En cas de doute ,et si, possible, la préférence sera donnée plutôt aux lettres de Paul qu’aux Actes.

b-      Qu’apprenons-nous sur ses origines ?  Paul est un juif né à tarse en Cilicie ( Turquie actuelle), peut-être vers l’an 7 ( il serait donc  approximativement 12 ans plus jeune que Jésus). Ce juif de la diaspora grecque a une double culture, juive et hellénistique. Il est citoyen romain ce qui est assez rare à cette époque, mais nous ne savons pas si c’est à titre personnel ou par héritage familial. En tout cas, il porte deux noms : Paul comme nom romain, et Saoul ( prononcer Chaoul) comme nom sémitique, hellénisé en Saul. Sa famille nous est connue indirectement. Il semblerait qu’elle fut importante en nombre et en notoriété. En effet on rencontre des parents de Paul dans l’ensemble du basin méditerranéen, ce clan travaille dans l’industrie textile et lui servira de réseau de soutien tout au long da sa vie. La notoriété de cette famille se devine aux égards dont parfois  des personnalités font preuve  envers lui  - à Chypre il est reçu par le gouverneur romain -Sergius Paulus-, prisonnier à Rome à la fin de sa vie, il bénéficie d’une certaine liberté..- .Lui même exerce un métier du textile  ( fabricant de tentes), durant ses voyages il n'hésitera pas à travailler afin de ne pas dépendre des communautés locales , à Corinthe par exemple (2).

Son éducation juive s’effectue à  Jérusalem, à l’âge de l’adolescence auprès d’un grand maître pharisien, Gamaliel(3). Paul étudia à Jérusalem car les pharisiens ne se rencontrent pas hors de Palestine. Si  son éducation juive fait de lui un pharisien lettré, sa structure de pensée est également grecque, s’il parle l’araméen, il pense et écrit en grec ( comme la plupart des Juifs de la diaspora qui utilisent donc la Bible dans sa version des Septante). Le grec est à cette époque la langue véhiculaire de toute la méditerranée, c’est l’anglais actuel.

 

c-      Les premières actions publiques de Paul ( qui a alors 20- 25 ans) nous le montrent comme un juif extrêmement zélé dans sa foi et persécuteur des « chrétiens ». Il est présent à la lapidation d’Etienne ( chef du groupe appelé les Hellénistes) vers 33 . On ne sait pas s’il a personnellement participé à ce lynchage , en tout cas, il l’approuve. Les Hellénistes sont un des premiers groupes chrétiens à Jérusalem, leur adhésion est certainement liée aux paroles de Jésus sur le Temple et la loi. Leurs conceptions ont du exaspérer Paul qui les persécute. Peut-être n’a t-il poursuivi que cette tendance helléniste ( on sait par ailleurs que les autres «  chrétiens » de Jérusalem, avec Pierre et Jacques n’interviennent pas pour secourir Etienne).(4).

Nous retrouvons Paul sur la route de Jérusalem à Damas, avec la bénédiction du Grand Prêtre nous dit-on dans les Actes ( Damas est pourtant hors de sa juridiction) pour y extirper cette nouveauté   ( que l’on appellera plus tard le christianisme ) (5). Dans cette ville de Damas, à la limite du désert vivait une communauté juive  déjà contactée par les hellénistes «  chrétiens » venus se réfugier ici après la persécution dont ils furent l’objet. Le premier rôle de Paul est donc celui du persécuteur acharné, zélé.

 

 

2-      Comment devint-il apôtre ? (34-35 ?)

a-      La tradition. Chacun a en mémoire une image de la « conversion » de Paul sur le chemin de Damas. En plein midi, aveuglé et jeté à terre par une grande lumière identifiée à une apparition divine, Paul obéit à la voix céleste lui révélant Jésus ressuscité et par là même l’absurdité de son action de persécution.  Il s’agit d’un retournement qui à pour origine Dieu en personne. Paul ainsi devient témoin de la résurrection, de Pâques ; il lui faut désormais le faire savoir, c’est ainsi qu’il devint apôtre, celui qui propage la nouvelle. L’épisode peut être situé vers 33- 35.

b-      Au-delà de ce scénario connu de tous, observons de plus près les documents à notre disposition.. Cette « conversion » est relatée différemment par quatre passages, trois dans les Actes (IX, 1-15 ; XXII, 1-21 ; XXVI, 1-23) et un dans la lettre de Paul aux Galates ( années 50) Ga I ,15-16. Les contenus ne correspondent pas, parfois, les compagnons entendent mais ne comprennent pas, ou ils voient mais n’entendent pas, lui-même dans sa lettre est beaucoup plus  discret pour relater ce retournement . Il est donc difficile de restituer l’événement derrière une diversité d’écritures de nature théologique. En fait ces différents récits s’adressent à des public différents et remplissent des fonctions différentes.

 Prenons deux exemples,

·         d’abord le passage d’Actes IX. Il faut ici replacer la scène dans une séquence beaucoup plus large en amont et en aval. La mission des hellénistes convertit des personnages atypiques comme des Samaritains ( rejetés par les Juifs) un eunuque éthiopien à Gaza ( l’eunuque représente le mutilé, rejeté par le judaïsme), Simon le magicien ( qui agit selon une technique et non pas au nom de Dieu), puis c’est le tour d’un persécuteur, Saul, et enfin, Pierre baptise un païen, le centurion Corneille . Les Actes veulent nous montrer par le biais de ces différents cas que le cercle des élus s’élargit et s’éloigne des Juifs qui ont refusé d’adhérer. De plus, dans ce chapitre IX, Paul aveuglé est conduit à Damas où sa mission lui est donnée par le juif « chrétien » Ananias qui lui-même l’a reçue d’une vision. Ananias le baptise ( Paul le persécuteur est désormais « chrétien », il emploie l’expression, partisan de la Voie), lui affirme que sa mission consiste à « évangéliser » les païens. Nous avons donc là un récit de vocation de Paul dans le cadre d’une mission d’Eglise. Paul est pris en charge par Dieu ,et par l’Eglise, il n’est donc pas ainsi un acteur isolé.

·         Dans le passage de la lettre aux Galates, comme deuxième exemple, nous avons un texte écrit selon le modèle des vocations de prophètes, Isaïe notamment ( Isaïe XLIX, 1 : « Dieu m’a appelé dès le sein maternel »). L’indication affirme ici que c’est Dieu lui-même et non l’Eglise qui lui donne la connaissance directe de Jésus ressuscité, ainsi son évangile est-il authentique, le bon, il ne vient pas des hommes ( ce qui lui permettra lors de ses péripéties en pays Galate, de rejeter les autres conceptions).

c-      Sa conception de l’apostolat découle de ce constat.

Il a une conscience pleine et totale d’être apôtre, choisi directement par Jésus-Christ, à égalité avec les autres de Jérusalem, ceux qui ont connu Jésus dans sa vie terrestre. Il déclare à  ses amis Corinthiens en I CO IX, 1-2 : « Ne suis-je pas libre ? Ne suis-je pas apôtre ? N’ai-je pas vu Jésus, notre seigneur ? Si pour d’autres, je ne suis pas apôtre, pour vous au moins je le suis ; car le sceau de mon apostolat, c’est vous qui l’êtes, dans le Seigneur ». Il y a une double légitimité de son apostolat ; la révélation et le résultat de son action.

Il ne cherche pas à tirer gloire de cette situation, s’adressant encore aux Corinthiens, il se situe humblement parmi les apôtres : I CO XV, 3-8 : «  Il (Jésus) est apparu à Céphas puis aux douze, ensuite, il est apparu à plus de cinq cent frères à la fois, la plupart sont encore vivants et quelques uns sont morts. Ensuite il est apparu à Jacques, puis à tous les apôtres. En tout dernier lieu, il m’est aussi apparu, à moi, l’avorton, car je suis le plus petit des apôtres, moi qui ne suis pas digne d’être appelé apôtre parce que j’ai persécuté l’Eglise de Dieu ». Ce terme d’avorton a été beaucoup commenté ; plutôt qu’un sens de faible, malingre, il signifierait  ici l’idée d’arrachement, de naissance aux forceps. Il y a l’idée d’un arrachement de force de Paul de sa première situation pour le faire naître comme apôtre des païens.

Cependant, dans des situations de concurrence, la question d’un certain prestige lié au titre d’apôtre s’est posée. C’est le sujet de réflexion d’un passage de la deuxième lettre aux Corinthiens : II CO XII, 1-5 « Faut-il s’enorgueillir ? C’est bien inutile ! Pourtant j’en viendrai aux visions et révélations du Seigneur. Je connais un homme en Christ, qui voici quatorze ans- était-ce dans son corps ? Je ne sais, était-ce hors de son corps ? Je ne sais, Dieu le sait, cet homme là fut enlevé jusqu’au troisième ciel. Et je sais que cet homme- , était-ce dans son corps ? était-ce sans son corps ? Je ne sais, Dieu le sait- cet homme fut enlevé jusqu’au paradis et entendit des paroles inexprimables qu’il n’est pas permis à l’homme de redire. Pour cet homme là, je m’enorgueillirai, mais pour moi, je ne mettrai mon orgueil que dans mes faiblesses ».Ce récit de vision bâti avec des mots de l’apocalyptique juive doit beaucoup à un texte contemporain de Paul : »Les secrets d’Henoch ».

Cette  volonté d’humilité est très représentative des idées de Paul chez qui la croix de Jésus joue un rôle théologique central. « Je porte dans mon corps les marques de Jésus » peut-on lire en Gal. VI,17. Une interprétation moderniste y a vu des stigmates. Dans l’antiquité les esclaves portaient une marque d’infamie, Paul se dit parfois esclave du Christ !, dans l’orient romain certains adeptes de telle divinité portaient des marques sur leur corps ; dans le cas présent il semblerait que toutes les blessures corporelles reçues dans sa vie lors d’expulsion des communautés juives de villes d’Asie Mineure aient été interprétées dans le sens d’un rabaissement comme Jésus-Christ sur la croix.

Les Actes citent huit miracles accomplis par Paul, sans trop développer ce thème ( huit, c’est très peu par rapport à l’activité miraculeuse des grands mystiques païens). Ces miracles différent selon le milieu auquel ils s’adressent : En milieu juif se sont des exorcismes (il chasse les mauvais esprits), en milieu païen grec et romain, ce sont des guérisons. Paul est ici guérisseur comme le Dieu Asclépios à Epidaure en Grèce. D’ailleurs dans toute la partie orientale de la Méditerranée il laissa le souvenir d’un apôtre  thaumaturge.

 

3-      Ses débuts difficiles dans la « Voie » ( chrétienne)

 

       Après sa « conversion », Paul demeure quelques temps à Damas avec la communauté juive au sein de laquelle il prêche la foi nouvelle avec ses nouveaux amis tel Ananias. Il reste dans cette région, et va au désert d’Arabie  dit-on dans les textes. Le désert a une image très forte dans la culture juive, c’est le lieu de la formation du peuple à l’époque de Moïse, c’est le lieu où l’on se retire pour se retrouver avec Dieu. Paul en a certainement besoin après ce retournement extraordinaire de situation. Ce désert n’est pas complètement vide d’hommes, il est alors occupé par les Arabes Nabatéens qui ont Pétra comme capitale. Nous ne possédons rien de précis sur cette période de sa vie. En tout cas, une chose est nette, Paul ne part pas  vraiment en mission juste après sa conversion. Lui l’ancien persécuteur va rencontrer maintenant de nombreuses difficultés en tant que « chrétien ».Des difficultés d’intégration dans son nouveau milieu.

 

a-      37 fut pour lui l’année d’un triple échec.

·         échec à Damas qui est alors une ville romanisée, occupée par le roi Nabatéen Arétas IV et assiégée par les troupes romaines.(6). Il dut partir de nuit, en hâte , se laissant glisser le long des murailles dans un couffin. Pour quelles raisons ? Selon les Actes,(IX, 23-25) il est chassé par les Juifs ; quel crédit peut-on faire à ce texte ? Il faut toujours avoir à l’esprit que Luc rédige ce document dans les années 80, c’est-à-dire dans un contexte de début de séparation entre Juifs et chrétiens, systématiquement le même schéma est repris : Paul prêche aux Juifs qui rejettent le message alors que les païens eux l’acceptent ; le registre du récit des Actes est donc beaucoup plus théologique qu’historique. Dans sa lettre aux Galates, Paul évoque plutôt un contexte de suspicion  à l’égard des étrangers comme lui, dans cette ville assiégée.

·         Echec à Jérusalem où il séjourne une quinzaine de jours seulement, trois ans après sa conversion. Il n’y rencontre que Pierre et Jacques le frère du Seigneur. Les autres apôtres ont-ils refusé de le recevoir ou sont-ils tout simplement absents de la ville   C'est Barnabas, un juif hellénisé de Chypre et acquis à la « Voie », qui l’introduit auprès de ces « colonnes » de Jérusalem. Là également ce bref séjour se passe mal, il doit partir pour sauver sa vie. Est-il chassé par des Hellénistes qui ne croient pas à sa conversion et se souviennent d’une manière cuisante du persécuteur qu’il était il y a trois ans ? Lui même nous dit avoir eut la vision du Christ alors qu’il était en prière au Temple, vision l’avertissant d’un danger et l’invitant à fuir.

·         Echec à Césarée maritime, capitale de la province romaine et siège du pouvoir. La communauté juive de cette ville portuaire est déjà touchée par la prédication chrétienne des Hellénistes. Philippe est le principal apôtre de cette côte. On peut facilement imaginer le rejet de Paul par ces « chrétiens » pour les mêmes raisons qu’à Jérusalem. Ne sachant plus très bien où aller, Paul retourne dans son pays natal, à Tarse en Cilicie. Qu’y a t-il fait ? nous n’avons sur cette période aucun renseignement.

b-      Paul appelé à Antioche.

Antioche de Syrie est une grande ville où la communauté juive installée ici depuis trois siècles, est partiellement touchée par la prédication helléniste. C’est d’ailleurs ici que le mot chrétien apparaîtra dans les années 40. La communauté « chrétienne » de Jérusalem qui attendait la Parousie, s’inquiète tout de même d’une prédication qui lui échappe, aussi décide t-elle d’envoyer des « inspecteurs » sur les traces des hellénistes, à Antioche entre autres. C’est Barnabé qui est choisi pour cette mission difficile. La situation à Antioche est assez agitée, aussi, Barnabé pour y remettre de l’ordre, va t-il chercher Paul à Tarse. Cet ancien agitateur sera peut-être l’homme de la situation ici !

Ainsi commence la véritable période apostolique de Paul, d’abord comme compagnon de Barnabé, puis plus tard comme fondateur de communautés. Nous sommes peut-être vers 43-44., dix ans après sa conversion !.

 

 

II-                ACTIVITE MISSIONNAIRE DE PAUL

 

              Habitant de la diaspora grecque, Paul est déjà habitué à voyager dès sa jeunesse ,de Tarse à Jérusalem, puis dans la région de Damas. Il n’est pas le premier missionnaire « chrétien » car avant lui et peut-être à cause de lui, les Hellénistes  durent quitter Jérusalem ce qui les incita à être les pionniers de l’annonce de l’évangile. Par contre, les voyages missionnaires de Paul sont mieux connus grâce aux Actes et à ses propres lettres. Traditionnellement, on lui attribue trois grands voyages missionnaires     ( plus de 4000 km) sans compter , le ou les voyages comme prisonnier.

 

1-      Paul le voyageur

a-      Quelles sont les conditions de voyages à cette époque ?

·         les conditions politiques sont favorables, depuis peu l’ensemble méditerranéen vit dans le cadre de la paix romaine ( les seules régions troublées se trouvent d’ailleurs en Palestine). Cette « pax romana » n’exclue pas localement la présence encore de pirates et de brigands. Mais en tout cas, c’est une même autorité qui domine cet espace.

·         Les conditions culturelles sont beaucoup plus variées. Si le grec est partout parlé comme langue universelle méditerranéenne, les cultes religieux locaux sont extrêmement divers à côté des grands cultes officiels grecs et romains. La diaspora juive est présente dans la plupart des régions.

·         La circulation par voie terrestre est facilitée par la construction, parfois récente, d’un bon réseau de voies romaines. Des haltes sont prévues tous les 25-30 km ( distance faisable à pied dans une journée). Paul pouvait également être hébergé chez des Juifs installés le long de ces axes routiers. Les aubergistes n’étaient pas toujours scrupuleux et le voyageur se retrouvait parfois réduit à l’esclavage. Ces itinéraires sont certes très fréquentés par les militaires, les fonctionnaires, les marchands… mais les dangers sont toujours présents ( brigandage, attaques de hordes de chiens ou de loups..) Voyager reste dangereux. En Asie Mineure où Paul s’aventure, les montagnes comme le Taurus ne sont pas d’un franchissement aisé. Il faut du courage, Paul n’en a jamais manqué).

·         La circulation par voie maritime, par cabotage ou parfois en haute mer, n’était pas non plus sans risque. La Méditerranée connaît de fortes tempêtes à la mauvaise saison. L’hiver en principe, la mer « était fermée », les bateaux officiels ne naviguaient plus, seuls se hasardaient quelques navires de marchands avides de gain ( Paul expérimentera cela à ses dépends).

b-      où ?

- ( consulter la carte en annexe pour retrouver ses itinéraires)

·         Le premier voyage s’effectue  à Chypre et en Anatolie en pays galate. Paul n’est que le second de Barnabé

·         Le deuxième voyage le mène en Grèce et en Macédoine. La ville de Philippes sera le premier pôle chrétien de sa mission dans cette région. La mission est conçue comme un périple, Paul revient à son point de départ, Antioche.

·         Pour son troisième voyage, il s’installe à Ephèse d’ou il envoie ses compagnons pour visiter les églises déjà en place. Ce troisième voyage va le ramener à Jérusalem où il sera arrêté.

-          Paul évolue dans un milieu essentiellement urbain, alors que Jésus, sauf exceptions, reste à la campagne.

-          Il préfère les villes romaines ( de fondation ou avec présence de garnisons) aux villes grecques ( sauf passage obligé à Athènes par exemple où il se trouve en 51).Comment tenter d’expliquer ce choix ?

·         Dans les villes romaines, la reconnaissance de sa citoyenneté romaine et de son statut juif était plus facile

·         Paul évite le plus souvent les zones où d’autres disciples sont déjà présents, mais cela n’est pas systématique, car dans des villes comme Ephèse et Corinthe, plusieurs communautés chrétiennes coexistent.

·         Surtout il cherche à retrouver des membres de sa famille éparpillée tout le long des routes commerciales du textile. Paul vit à l’intérieur de ce réseau qui lui sera toujours d’une grande aide. En grande partie, les itinéraires de Paul sont ceux du textile en Méditerranée. Ponctuellement, Paul nous dit être guidé ici par un songe, une vision, ailleurs c’est une maladie qui le retient et l’entraîne à évangéliser plus que prévu. Globalement, il n’y a donc pas chez lui un plan d’ensemble de voyages missionnaires bien arrêté, même si l’on sait qu’il a toujours souhaité aller jusqu’en Espagne.

 

c-      avec qui  voyage t-il? ( voir l’annexe des compagnons et parents).

Les documents nous fournissent 16 noms de collaborateurs qui le représentent dans l’ensemble méditerranéen. Le noyau le plus stable , constitué de douze missionnaires, vient d’Ephèse, recruté au cours des différents voyages. Il y a une sorte de hiérarchisation parmi eux. Il les considère comme des associés, investis de l’autorité charismatique  d’un apôtre. Ils sont souvent gratifiés du mot frère ou sœur, certains l’aideront longtemps comme Timothée, d’autres vont reprendre leur liberté comme Sylvain et Barnabé.

 

2-      actions de Paul dans les communautés juives de la diaspora.

 

Lorsqu’il arrive dans une ville choisie pour être évangélisée, il prend contact avec la communauté juive et la synagogue devient naturellement son lieu d’action. Ce lieu de prières et d’étude est fréquenté par une population hétérogène.

a-      Qui fréquente les synagogues ? Le judaïsme possède à cette époque un pouvoir attractif sur des Grecs et des Romains. Le monothéisme, le mode vie particulier des Juifs ( nourriture casher, circoncision, pratique du sabbat, un calendrier de fêtes particulier, le culte sacrificiel rendu à Dieu dans un seul temple à Jérusalem) séduisait certains. Etre juif c’est à la fois une adhésion de foi, un choix religieux, et une appartenance au peuple élu, au peuple « saint ». Adhérer au judaïsme à l’époque de Paul signifiait non seulement une conversion à une autre religion mais aussi une naturalisation pour employer un mot moderne, c’est à dire l’entrée dans un autre peuple. Ces exigences expliquent donc que les Grecs et Romains attirés par ce judaïsme ne se soient engagés souvent que partiellement. Dans les synagogues, à côté des Juifs de « souche », on rencontre donc aussi des catégories diverses comme les prosélytes et les « craignant-Dieu ». Les prosélytes sont les nouveaux convertis qui adhèrent totalement et sont circoncis. Ils sont issus la plupart du temps des couches sociales inférieures, celles qui n’ont rien à espérer dans la société gréco-romaine, alors qu’en devenant juives, ces personnes bénéficient de l’ « exception culturelle » reconnue aux Juifs dans le monde romain.(7).  Les « craignant-Dieu » au contraire viennent des milieux aisés, ils fréquentent la synagogue, lisent la Torah mais n’ont pas franchi totalement le pas, ils ne sont pas circoncis. Ce n’est pas dans leur cas un problème de tiédeur de foi, mais  une volonté de ne pas devenir étrangers de façon à conserver leur statut social. Ces différentes catégories de sympathisants entraînaient des séparations, le christianisme primitif va se heurter à ce problème : peut-on attirer sans intégrer, comment ainsi prétendre à l’universel ?

b-      L’action de Paul dans les synagogues , spécialement les jours de sabbat, doit être comprise en ayant bien à l’esprit cette diversités de personnes. La cérémonie du sabbat débute par la récitation du « shema Israël »(8), des 18 bénédictions, puis par la lecture d’un passage de la Torah et de son parallèle dans les Prophètes(9). La prédication peut être offerte à un érudit de passage – c’est dans ce créneau que Paul agit-, et, la cérémonie est close par une bénédiction. Paul, selon la région où il se trouve s’est s’adapté à son public, à Athènes et à Corinthe il n’hésite pas à citer des philosophes grecs comme Aristote.(10).

c-      Comment cette action d’annonce de Jésus-Christ est-elle reçue ? ce sont les nouveaux convertis et les craignant Dieu qui sont sensibles au nouveau message plutôt que les Juifs traditionnels. C’est ainsi qu’il faut comprendre cette affirmation mainte fois répétée de Luc dans les Actes , du refus des Juifs et de l’acceptation par les païens ( païen signifie craignant –Dieu ou prosélyte, c’est à dire ceux qui dans l’orbite du judaïsme ne sont pas d’origine juive). L’opposition des Juifs est souvent violente, Paul reçoit des flagellations rituelles(11), réchappe de justesse à des lapidations(12), est dénoncé et poursuivi, dans le meilleur des cas il est simplement exclu de la synagogue de telle ville mais peut tout de même continuer à prêcher dans le cadre privé d’une maison particulière. Pourquoi un tel acharnement contre lui ? Parce qu’il annonce que Jésus est le Messie ?(13) non, plusieurs Juifs au Ier siècle ont été proclamé messie sans poser de problèmes particuliers. Il est accusé de déprécier la Loi en prônant l’égalité dans la Voie entre adeptes d’origine juive ou païenne, ce qui revenait à supprimer les séparations traditionnelles et mettre fin à l’élection d’Israël, à son « exception culturelle et théologique ». Ceci était pour les Juifs inadmissible.

 

3-      Paul fondateur et organisateur de communautés « chrétiennes ».

        L’action de l’apôtre consiste à annoncer, à l’intérieur du judaïsme, la révélation reçue à propos de Jésus. Il est fondateur de communautés, il transmet  à ses nouveaux disciples ses charismes et pouvoirs par le rituel de l’imposition des mains qu’il a lui-même reçu à Antioche. Il baptise peu personnellement, ceci est le travail de la communauté créée.

a-      Ces nouvelles communautés sont appelées églises. Le terme est déjà connu de l’ « Ancien Testament » dans sa version grecque des Septante , avec le sens d’Assemblée du peuple de Dieu. Dans l’acceptation profane, l’église est chez les Grecs l’assemblée politique. Les premiers « chrétiens » reprennent cette expression pour désigner soit la communauté d’une maison privée adhérant à la nouvelle voie juive ou l’ensemble de ces cultes privés à l’échelle d’une ville. Il n’y a pas à l’époque de Paul, une Eglise qui serait une organisation centralisée au-dessus des communautés locales. Certes, Paul se dit « Père » ou « Mère » de ces groupes qu’il a fondé, mais cela n’implique pas une organisation structurée telle qu’elle apparaîtra plus tard. C’est l’esprit saint qui dirige(I CO, XII,4-21). Il faut se souvenir que Paul et ses disciples attendent la Parousie comme un événement imminent, pourquoi donc s’organiser dans ce cas, s’organiser c’est se projeter dans la durée ! Les membres des communautés pauliniennes sont des hommes et des femmes- à égalité-, des pauvres et des riches, des maîtres et des esclaves, chacun est invité à demeurer dans l’état où il se trouvait quant il a été appelé, la Parousie est imminente ; il n’y a pas chez Paul de doctrine sociale ; elle est inutile, il n’y a pas de temps pour ce sujet.

b-      Après une fondation, Paul ne laisse pas tomber cette église, il conserve des liens très étroits et amicaux avec ses membres. Il garde le contact soit en envoyant un de ses proches régler un problème, soit  par courrier. Sur les 13 lettres qui nous sont parvenues, les spécialistes en attribuent 7  directement à lui-même, les autres étant postérieures, rédigées par ses disciples sous le couvert de son autorité post-mortem. Ces lettres sont dictées à un secrétaire, parfois Paul écrit de sa main les dernières lignes et le fait savoir. Le messager qui  apporte personnellement le courrier est en principe capable de le commenter. Même si Paul tempête parfois contre tel ou tel écart dans la doctrine, le ton est très fraternel lorsqu’il s’adresse soit à un compagnon ami comme Tite ou Timothée, soit à une église locale.

c-      Les exemples abondent dans cette correspondance.

·         Lorsqu’il apprend que les églises galates qu’il a fondées s’éloignent de son enseignement pour adhérer à un « autre évangile », il défend sa position par deux arguments majeurs :son apostolat lui vient directement de Dieu , par révélation, et non par transmission humaine, mais tout de même, ce qu’il dit est en accord avec les « colonnes de Jérusalem », entendez par-là l’accord avec Pierre et Jacques, le frère du seigneur, lors  d’une réunion appelée « concile de Jérusalem ( vers 49 ?).Ga.II,6-9.

·         Les chrétiens de Corinthe sont déchirés dans une querelle de chefs, certains disent appartenir à Pierre, d’autres à Paul, etc.. Paul rappelle à cette communauté qui ne dépend pas entièrement de lui, qu’il n’y a qu’un seul maître, Dieu, et que tous les apôtres ne sont que des serviteurs.

·         Les salutations nombreuses dans ses lettres nous permettent de connaître un peu mieux les milieux chrétiens d’alors, nous rencontrons souvent des noms  d’origine grecque de toutes couches sociales.

L’activité missionnaire de Paul certes lui apporta beaucoup de joie et de récompense mais également beaucoup d’ennemis. Il ne cessa d’être poursuivi, tracassé, accusé, chassé et finalement il sera arrêté ; ses dernières années sont celles de la prison et de la condamnation.

 

 

III-             LES DERNIERES ANNEES DE PAUL

 

1-      Paul prisonnier ; dans quelles circonstances ?

a-      retour à Jérusalem ( 55 ?). Paul hiverne à Corinthe fin 54, repousse à plus tard son voyage à Rome ( déjà préparé pourtant) et en Espagne afin d’apporter personnellement le fruit de sa collecte aux « saints de Jérusalem ». Cette collecte organisée depuis quelques années dans les communautés pauliniennes d’Asie Mineure , de Macédoine et de Grèce, a été, ces derniers temps le souci premier de Paul. Les spécialistes discutent toujours de la raison de cette collecte . Est-ce un signe de reconnaissance à l’égard de Jérusalem et notamment de Jacques ? Est-ce un geste de solidarité pour souligner la nécessité de l’unité des « chrétiens » ou plutôt des Juifs ? Est-ce pour lutter contre une famine survenue en Palestine entre 46 et 48 ? famine due à la sécheresse ou à l’année jubilaire (14)? Il est difficile de trancher ; une chose est sûre, cette action apparaît comme essentielle à Paul. Il sait pourtant que cette ville de Jérusalem est dangereuse pour lui, venant de Corinthe, il évite Ephèse (15) pour la même raison.

b-      Agitations au Temple. Paul arrive dans la ville sainte précédé par une rumeur, une mauvaise réputation venue d’Asie Mineure, Pierre n’y est plus là, c’est Jacques qui dirige la communauté et le reçoit très froidement. Jacques le frère du Seigneur et son entourage sont inquiets face à un personnage turbulent, jadis zélé pour défendre le judaïsme strict contre les « chrétiens » et maintenant soupçonné d’être contre la Loi, le Temple et la circoncision.(Actes XXI,21). En effet, la position de Paul sur la circoncision peut apparaître comme ambiguë : tantôt, il la déclare dépassée et inutile ( pour les convertis d’origine païenne, c’est-à-dire, les craignant –Dieu), tantôt il la préconise comme dans le cas de Timothée, nouveau converti, né d’une mère juive et d’un père païen. Cette position pouvait être jugée opportuniste et impie. Jacques lui demande donc de prouver par un geste fort au Temple, son appartenance  et sa fidélité au judaïsme. Paul accepte, va au Temple, offre un sacrifice de purification, paie les frais de quatre nazirs(Actes XXI, 23-24) (16). On voit donc que Paul, adepte de la « Voie », se sent toujours juif, il ne souhaite pas rompre avec le judaïsme, il ne change pas de religion !.C’est à cette occasion, qu’il est reconnu par des Juifs venus d’Asie Mineure et accusé de transgressé la Loi juive en introduisant une personne non circoncise à l’intérieur de l’enceinte du Temple. (Actes XXIII, 27-29). Cette accusation était-elle fondée, on ne peut le savoir ! en tout cas, cette transgression méritait la mort immédiate par lynchage. Paul est conduit par des Juifs hors des murs pour être tué sans procès, par lynchage comme la Loi le prescrivait. (17). Heureusement pour lui, dans le climat politique tendu de l’époque, les soldats romains viellaient depuis la forteresse Antonia proche et sur les toits des portiques. Le tribun accourre, s’empare de Paul qu’il prend pour un agitateur terroriste, voire même pour un juif égyptien qui s’était révolté récemment(18), et le conduit enchaîné à la forteresse. Le tribun a maintenu l’ordre et par là même lui a sauvé la vie.

c-      Paul accusé, prisonnier des Romains. Les lyncheurs de Paul se sentent frustrés, ils crient et manifestent devant la garnison romaine. Les cris de la foule ont valeur d’accusation, Paul obtient le droit de se défendre. Luc dans les Actes recompose ce discours  adressé aux Juifs et tenu en araméen. Que dit-il ? il ne cherche pas à exposer une sorte de catéchisme chrétien mais à souligner son appartenance au judaïsme. Tant qu’il rappelle ses origines juives à Tarse, son éducation auprès de Gamaliel, sa croyance à Jésus messie, tout va bien, sa volonté d’ouvrir une nouvelle voie dans un judaïsme pluriel est acceptable ; mais, l’accusation redouble lorsqu’il se dit apôtre des païens. Cela est intolérable pour les autres Juifs, la frontière entre Juifs et non Juifs est indispensable à leur identité. Il ne peut y avoir égalité entre les deux groupes.

Le tribun Lysias se méfie, il doit maintenir l’ordre, mais aussi ne pas déplaire aux Juifs qui n’hésitent pas à aller se plaindre directement à Rome (19) lorsque leur statut d « ’exception culturelle » est menacé. Il décide de convoquer le Sanhédrin (20) de façon à affiner le chef d’accusation contre Paul. Le Sanhédrin est alors composé de sadducéens et de pharisiens – dont de nombreux amis de Paul issu de cette tendance. Les deux groupes inévitablement se disputèrent au sujet de la résurrection de Jésus, ainsi, cette vénérable assemblée fut-elle incapable d’émettre un avis clair, un acte d’accusation précis, au grand embarras du tribun. Paul malgré cela est constamment en danger, de jeunes sicaires (21) veulent l’assassiner entre deux audiences ; c’est un de ses neveux qui en avertit le tribun. Paul, sous bonne garde et de nuit est transféré à  Césarée, la capitale régionale.

 

2-    Paul aux mains des Romains ; de Césarée à Rome

 

a-      55-56 , deux ans de prison à Césarée sous le Procurateur Antonius Felix.

Le procurateur hérite d’un cas embarrassant, Paul avec sa double « citoyenneté est un prisonnier encombrant avec un dossier mal instruit. Antonius Felix, comme vingt ans auparavant Ponce Pilate,(22) est un homme très ferme et dur qui n’hésite pas à réprimer sévèrement les révoltes juives par des centaines de crucifixions le long des routes. Par ailleurs, il a une vie un peu dissolue, il cède comme beaucoup de fonctionnaires romains d’alors, au mirage de la vie orientale et épouse une belle jeune fille juive.

La présence de toutes les parties d’accusationset de témoignages est nécessaire pour lancer véritablement le procès de Paul. Pour de nombreuses raisons, ce regroupement à Césarée ne sera jamais possible, aussi, Paul reste t-il en prison, en attente.

Luc nous reconstitue les pièces du dossier.

·         Les chefs d’accusations évoluent  et varient selon les parties en cause : pour les Juifs d’Asie, c’est la profanation du Temple, pour le Sanhédrin, c’est l’apostasie, pour les Romains, c’est la sédition dans le cadre de la diaspora, car Paul est désigné comme chef de la « secte » des Nazoréens           ( synonyme de Voie, de chrétiens)(23) , distinctes du judaïsme et donc religion illicite. Une nouvelle accusation apparaît, celle d’une collecte concurrente de l’impôt dû au Temple.

·         Des arguments sont prêtés à Paul dans une plaidoirie. La collecte ne concurrence pas l’impôt légal dû au Temple, c’est un acte de solidarité entre Juifs ( et non pour les seuls « chrétiens »), il n’est resté que 15 jours à Jérusalem, il n’a pas cherché à comploter, et surtout, Paul s’affirme juif avec seulement une foi particulière, mais il le  souligne, au sein du judaïsme, sa vie est dirigée par sa propre conscience ( pensée grecque).

 

b-      57 ; procès avec Festus et le roi Agrippa II. Le nouveau procurateur, Festus, hérite de ce procès qui traîne. Luc nous dit que le Roi Agrippa II(24) et son épouse, Bérénice, venus  à Césarée peut-être pour une visite de politesse, sont invités par Festus à assister au procès de Paul. Ce cadre posé par Luc est l’occasion de faire prononcer par Paul un beau discours en grec cette fois, pour un public cultivé, de notables hellénisés. Comme lors du discours prononcé à Jérusalem, Paul ne se lance pas dans un exposé de contenu de foi chrétienne, mais rappelle les grandes étapes de sa vie avec le souci principal de ne pas apparaître comme trop novateur ; il insiste sur ses racines juives, plus sur les éléments de continuité que sur d’éventuelles ruptures.

Une fois encore le procès s’enlise ; on soupçonne ici l’action importante menée par ses amis. Pour en finir, le procurateur décide de le ramener à Jérusalem où toutes les parties pourront être présentes. Par crainte d’assassinat, Paul refuse cette proposition et demande  que son procès soit transférer à Rome comme il y a droit en tant que citoyen romain. Cet appel à César accepté par le procurateur, l’action  de ses proches, montrent bien qu’il appartient à une famille  importante         ( souvenons-nous qu’au tout début, lorsqu’il était le second de Barnabé, il fut protégé par le gouverneur de Chypre, Sergius Paulus).

 

c-      voyage  tourmenté vers Rome par bateau . Ce voyage longuement raconté par les Actes des Apôtres, faillit lui coûter la vie. C’est l’automne, la mer « est fermée », seuls quelques bateaux privés osent s’aventurer. Le navire sur lequel Paul est embarqué, enchaîné, surveillé par des soldats romains doit affronter un fort vent de nord-est, l’aquilon d’hiver, qui soulève une terrible tempête de 13 jours. Sur ce navire en perdition, Paul nous est dépeint comme le seul lucide, c’est un sage qui ne panique pas, c’est lui qui donne des conseils à un capitaine et à un centurion obéissants. Lorsque le navire fait enfin naufrage au large de Malte, non seulement il n’est pas tué comme l’éxigeait le règlement,  mais c’est lui qui organise les dernières manœuvres. Le héros de Luc sort vivant de son quatrième naufrage !

 

 

3         Paul à Rome ( printemps 58 ? ou 60 ?)

 

a-      Il arrive épuisé mais bien reçu par les communautés juives

 Ce voyage à Rome, Paul l’avait envisagé depuis longtemps déjà, mais bien sûr pas dans ces conditions. Il y a trois ans il s’était adressé à cette communauté  par un écrit où il fait le point sur la voie chrétienne (« la lettre  aux Romains »). Des « chrétiens » de Rome viennent à sa rencontre. A Rome, ce prisonnier jouit d’une certaine liberté ; certes il a toujours un centurion romain à ses côtés, mais, il peut recevoir ses amis dans une maison louée, il peut prêcher. A Rome, la communauté juive est importante mais divisée. Les synagogues le reçoivent très diversement, il semble que là comme ailleurs, ce soient plutôt les craignant Dieu qui se convertissent, alors que les Juifs d’origine restent sceptiques. Des communautés chrétiennes s’organisent dans des maisons privées, ses parents et amis venus d’Ephèse et de Corinthe y jouent semble t-il un grand rôle. Le procès de Paul n’avance pas plus qu’à Césarée faute de présence des parties accusatrices. Il reste deux ans dans cette situation particulière de « détenu ».Notre source principal d’information, les Actes des Apôtres s’arrêtent ici.(25).  Le reste de sa vie est donc beaucoup plus problématique, un seul fait paraît certain, c’est sa mort  martyre à Rome.

b-      hypothèses sur ses dernières années. La documentation sur ses dernières années est hétérogène en origine et en crédibilité. Certains textes sont des écrits de témoins directs comme Clément  qui fut évêque de Rome à la fin du premier siècle, d’autres sont des apocryphes plus ou moins tardifs comme les « Actes de Pierre », écrits vers la fin du deuxième siècle. Il est très difficile de déterminer des jalons assez sûrs derrière la légende. Des chercheurs s’y sont essayé tout de même, ainsi, ce que nous proposons maintenant n’est qu’hypothèse. Nous ne retiendrons que ce qui nous semble le plus fondé.

·         Paul aurait été libéré sous Néron car sa situation n’a pas été vraiment tranchée. Cela peut sembler étonnant si l’on songe que des prêtres juifs déjà en prison depuis 55 , le restèrent jusqu’en 63. La notion juridique de prescription de 18 mois pour maintenir une accusation et l’emprisonnement n’apparaît qu’au Bas Empire. A t-il fait jouer des relations parentales bien placées à la cour ? dans sa lettre aux Romains, juste après des proches, il salue « Hérodion, son parent ». C’est  un nom hellénisé diminutif d’Hérode. Hérodion est un juif, lié à la famille hérodienne de Palestine ,converti au « christianisme », parent de Paul, certainement élevé à la cour impériale. Nous ne pouvons aller plus loin dans cette hypothèse, mais elle est intéressante. Souvenons nous au temps de Jésus, parmi les femmes qui le suivaient et qui lui permettaient de vivre, il y avait entre autres la femme de l’intendant d’Hérode !(26)

·         Où est-il allé après sa libération ? Il ne pouvait pas rester à Rome, c’était assez dangereux. Le danger venait en tout premier lieu des communautés juives déchirées entre elles et très divisées au sujet de cette nouvelle « Voie ». Le pouvoir impérial de l’époque de Néron invite de plus en plus aux délations ; Juifs comme Romains ne s’en privèrent pas, cela hélas fonctionne toujours bien ! Nos sources affirment  qu’enfin il put aller en Espagne ( où beaucoup d’exilés venaient se réfugier). Cette tradition d’un Paul en fin de vie  atteignant les « bornes de l’occident » est attestée aussi bien par Clément de Rome que par les Actes de Pierre. Malheureusement, sur place, en Espagne, nous n’en avons aucune trace. Des historiens néanmoins tiennent ce voyage pour vraisemblable.

·         A t-il effectué un ultime voyage en Orient pour visiter ses communautés ? C’est ce que laissent penser  les lettres à Tite et à Timothée, écrits postérieurs à sa mort. Admettons cette hypothèse. Ce dernier voyage missionnaire se passe très mal, à Ephèse les réactions juives sont encore plus violentes que les premières fois. Certains le quittent comme  le juif Alexandre, entrepreneur à Ephèse. Il se fait de nouveaux amis comme le riche Onésiphore. Cette communauté juive d’Ephèse est extrêmement déchirée, elle le restera  encore une vingtaine d’années jusqu’à l’arrivée d’Onésime, un esclave converti jadis par Paul qui mettra de l’ordre en s’appuyant sur les idées de l’apôtre. Selon l’hypothèse de ce voyage, Paul aurait été arrêté à Ephèse pour les même motifs que quelques années auparavant : accusations d’apostasie et de subversion. Le proconsul d’Ephèse ? envoie Paul à Rome par voie de terre ; le voyage aurait été encore plus pénible que le premier.

c-      la mort de Paul à Rome.

Arrivé à Rome ,à nouveau enchaîné, Paul cette fois est bien seul, beaucoup de compagnons l’ont quitté comme Philetos, Hyménaios.., le dernier carré des amis fidèles est restreint, il y a Trophine, Timothée, Aquila, le médecin Luc et le nouveau et fidèle compagnon Onésiphore.

A Rome, l’ambiance à changé en sa défaveur. Le culte de Néron se développe, le nouveau préfet du prétoire, Tigellia est une véritable brute. Dans les années 62-68, la police romaine persécute tous ceux qui apparaissent comme séditieux, et, pour être plus efficace, fait appel à la délation. Plusieurs faits ont marqués cette période, et, à chaque fois il fallait trouver des boucs émissaires, aussi, les adeptes de la Voie que l’on commence à appeler chrétiens et à distinguer des autres Juifs, sont des cibles toutes désignées mais pas les seuls. En 65-66, la persécution vise des philosophes stoïciens à Rome (27). Contrairement à une tradition qui paraît très évidente, Paul n’a peut-être pas été persécuté comme « chrétien » mais comme philosophe ! En effet, Rome a gardé pendant longtemps l’image d’un apôtre sage, philosophe comme tant d’autres grecs venus dans la capitale de l’empire entouré d’un petit groupe restreint de 7 à 8 disciples.

Quant est-il mort ? Dès son arrivée, vers 63, donc avant le martyr de Pierre et dans un contexte différent ? ou plus tard vers 67-68 ? Il est impossible de trancher dans l’état de notre documentation . Paul serait donc mort vers la soixantaine ; vers la cinquantaine, il se disait déjà vieux, fatigué ; ce qui est un sentiment légitime lorsque l’on connaît un peu sa vie mouvementée.

 

Trois réflexions vont nous permettre de conclure cette approche de la vie de Paul :

·         Contrairement à Pierre, le souvenir qu’il laissa à Rome, la ville de son martyr, s’estompa très vite pour pratiquement tomber dans un quasi oubli. A sa mort, son groupe se dispersa, Tite parti pour la Dalmatie, Démas pour l’Asie. .Une tradition fixe sur la route d’Ostie son martyr. L’actuelle basilique Saint-Paul-hors-les-murs, l’une des quatre basiliques majeures de Rome est une construction de l’époque de l’empereur Constantin ( IVe siècle), en grande partie reconstruite, agrandie, après un incendie ravageur en 1823. Entre le modeste édifice de Constantin,  et la splendide basilique actuelle, s’interpose, une seconde construction romaine, dite des trois empereurs ( Valentinien II, Théodose le Grand et Honorius), celle précisément qui brûla. Des fouilles furent menée au XIX e siècle, lors des travaux de reconstruction, les méthodes étaient peu performantes aussi les résultats furent-ils modestes. L’abside d’époque constantinienne fut mise à jour et l’on découvrit une plaque de marbre portant l’inscription : «  PAULO APOSTOLO MARTYRI » datée du IV e siècle. Proche de cette basilique, un cimetière païen a été découvert. On comprend ainsi la phrase du prêtre romain Gaius lorsqu’il écrit vers 200 « Si tu viens au Vatican ou sur la voie d’Ostie, tu trouveras les trophées des fondateurs de cette église ». L’édifice fut longtemps modeste, à l’image de son souvenir. Paul n’était pas le premier missionnaire à Rome, et ses idées ne furent pas les mieux reçues .

·         Nous avons tous à l’esprit l’image d’un Paul missionnaire par excellence. Qu’en est il, comment le situer parmi les autres ? Paul n’est pas poussé par une soif d’aventure et de conversion à tout prix, il ne cherche pas systématiquement à aller toujours plus loin. Progressivement, sur ses vieux jours, il voyage de moins en moins ( nous écartons bien sûr les voyages forcés, comme prisonnier). Lors de son troisième voyage, il s’installe à Ephèse, grand centre stratégique. Ce sont ses émissaires, Epaphrodite, Tite, Timothée.., qui assurent la navette avec les églises d’Europe afin de régler les problèmes. Il préfère organiser depuis un lieu central. Il n’a vraiment fondé des communautés que lors de la seconde partie de son premier voyage en Asie Mineure, et lors du second en Europe. Paul ne fut pas le premier missionnaire, ni le plus grand, ni le plus respecté de son temps ; ne soyons pas ébloui et illusionné par nos sources. Luc dans les Actes privilégie son héros. Son temps de mission et de voyage s’étale sur environ 20 ans dont une moitié en prison.

·         Comment rendre compte d’une vie aussi tumultueuse ? Paul a toujours été un homme de conviction, mais celle ci a évolué durant sa vie.

-          d’abord juif pharisien zélé, il lutte et persécute les adeptes de la « Voie », il se fait ses premiers ennemis, les Hellénistes

-          puis, après son retournement, toujours juif , mais adepte de la Voie, il lutte au nom de la foi au Christ contre les ses corréligionnaires, chrétiens judaïsants, conservateurs selon lui. Le nombre de ses ennemis s’accroît : ce sont les « chrétiens judaïsants » comme Pierre et surtout Jacques le frère du Seigneur, ce sont les Juifs de souche . Pour eux Paul va trop loin , il détruit la barrière identitaire avec les païens, et enfin, ce sont les Romains qui finissent par s’inquiéter de ce fauteur de trouble. Ce novateur, cet enfant terrible – du christianisme ou du judaïsme ?- fut perçu par beaucoup comme un gêneur. Il nous faut donc nous poser la question de ses idées, de sa contribution à la naissance du christianisme.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DOCUMENTS

1-      Actes des apôtres XXII,1-21 :     Paul retrace ses origines et sa vocation

« Je suis juif, né à Tarse en Cilicie, mais c’est ici, dans cette ville, que j’ai été élevé et que j’ai reçu aux pieds de Gamaliel une formation stricte à la loi de nos pères. J’étais un partisan farouche de Dieu, comme vous l’êtes tous aujourd’hui, et, persécutant à mort cette Voie, j’ai fait enchaîner et jeter en prison des hommes et des femmes. Le Grand Prêtre te tout le collège des Anciens peuvent en témoigner ; c’est d’eux en effet que j’avais reçu des lettres pour nos frères lorsque je me suis rendu à Damas avec mission d’enchaîner et d’amener à Jérusalem, pour les faire punir, ceux qui étaient là-bas.

Je poursuivais donc ma route et j’approchais de Damas , quand soudain, vers midi, une grande lumière venus du ciel m’enveloppa de son éclat. Je tombai à terre et j’entendis une voix qui me disait : «  Saoul, Saoul, pourquoi me persécuter ? » Je répondis : « Qui es-tu Seigneur ? ». La voix reprit : «  Je suis Jésus le Nazôréen, c’est moi que tu persécutes. » Mes compagnons virent bien la lumière mais ils n’entendirent pas la voix qui me parlait. Je demandai : « Que dois-je faire Seigneur ? » Et le Seigneur me répondit : « Relève- toi, va à damas, et là on t’indiquera toute la tâche qui t’est assignée. » Mais, comme l’éclat de cette lumière m’avait ôté la vue, c’est conduit par la main de mes compagnons que j’arrivai à Damas.

« Il y avait là un certain Ananias ; c’était un homme pieux, fidèle à la Loi, dont la réputation était bonne auprès de tous les Juifs qui habitaient là. Il vint me trouver et me dit alors : «  Saoul, mon frère, retrouve la vue ! » Et à l’instant même je la retrouvai et je le vis.  Il me dit : «  Le Dieu de nos pères t’a destiné à connaître sa volonté, à voir le Juste et à entendre sa propre voix. Tu dois en effet être témoin pour lui, devant tous les hommes, de ce que tu auras vu et entendu. Pourquoi donc hésiterais-tu ? Allons, reçois le baptême et la purification de tes péchés en invoquant son nom. »

« De retour à Jérusalem, alors que j’étais en prière dans le Temple, il m’arriva un jour de tomber en extase, et je vis le Seigneur qui me disait : « Vite, quitte Jérusalem sans tarder, car ils n’accueilleront pas le témoignage que tu me rendras ». Je répondis : «  Mais ,Seigneur, ils savent bien que c’est moi qui allait dans les synagogues pour faire mettre en prison et battre de verges ceux qui croient en toi ! Et lorsque le sang d’Etienne, ton témoin, a été répandu, moi aussi j’étais là, j’approuvais ses meurtriers et je gardais leurs vêtements ». Mais il me dit : «  va, c’est au loin, vers les nations païennes, que je vais moi t’envoyer. »

 

2-      Actes VII, 20-21 : exposé des origines de Moïse dans le discours d’Etienne

 

« C’est en ce temps là que naquit Moïse ; il était beau aux yeux de Dieu. Il fut élevé pendant trois mois dans la maison de son père, et, lorsqu’il fut exposé, la fille du Pharaon le recueillit et l’éleva comme son propre fils… »

 

3-      Galates I,15 Paul dans cette lettre évoque sa « conversion » selon des modèles bibliques connus :

 

 «  Mais, lorsque celui qui m’a mis à part depuis le sein de  ma mère et m’a appelé par sa grâce, à juger bon de révéler en moi son Fils afin que je l’annonce parmi les païens… »

Isaïe IV,1 « le Seigneur m’a appelé dès le sein maternel .. »

Jérémie I, 5 : «  avant de te façonner dans le sein de ta mère, je te connaissais déjà… »

 

4-      Paul parmi les apôtres : I Corinthiens, XV, 3-8

 

Il est apparu à Céphas puis aux douze, ensuite, il est apparu à plus de cinq cent frères à la fois, la plupart sont encore vivants et quelques uns sont morts. Ensuite il est apparut à Jacques, puis à tous les apôtres. En tout dernier lieu, il m’est aussi apparu, à moi, l’avorton. car je suis le plus petit des apôtres, moi qui ne suis pas digne d’être appelé apôtre parce que j’ai persécuté l’Eglise de Dieu. ».

I CO, IX, 1-2

« Ne suis-je pas libre ?Ne suis-je pas apôtre ? N’ai-je pas vu Jésus, notre Seigneur ? Si pour d’autres, je ne suis pas apôtre, pour vous au moins je le suis ; car le sceau de mon apostolat, c’est vous qui l’êtes, dans le Seigneur ».

 

5-      Visions et révélations, privilèges de l’apôtre. II CO XII, 1-5

 

« Il faut s’enorgueillir ? C’est bien inutile ! pourtant j’en viendrai aux visions et révélations du seigneur. Je connais un homme en Christ, qui voici quatorze ans- était-ce dans son corps ? je ne sais, était-ce hors de son corps ?, je ne sais, Dieu le sait-, cet homme-là fut enlevé jusqu’au troisième ciel. Et je sais que cet homme- était-ce dans son corps ? était-ce sans son corps ? je ne sais, Dieu le sait- cet homme fut enlevé jusqu’au paradis et entendit des paroles inexprimables qu’il n’est pas permis à l’homme de redire. Pour cet homme-là, je m’enorgueillirai, mais pour moi, je ne mettrai mon orgueil que dans mes faiblesses.

 

 

6-      quelques compagnons de Paul

Joseph dit Barnabas ( ou Barnabé), Luc, Marc, Aquila et Prisca ( ou Priscilla), Timothée, Tite, Appollos,, Aristarque, Artémos, Demas, Silas dit Silvanus ( Silvain)

Des parents de Paul : Sopratos, Rufus, Andronikus, Hérodion, Iason, Lucianus..

 

 

 

Accueil ] Remonter ]

 

Remonter
JESUS LE JUIF
LES ORIGINES
JACQUES,
L'Apôtre Pierre
Saint Paul
Saint Paul2
Le DIEU1
LE DIEU 2
Bible et Coran

 

Envoyez un courrier électronique à cultureetreligions@free.frpour toute question ou remarque concernant ce site Web.
Copyright © 1998 Groupe Culture Et Religions - Poitiers
Dernière modification : 03 janvier 2008