| |
Reconstitution de
l’itinéraire terrestre et céleste du personnage
L’histoire de Bulûqïyyâ a pour but de montrer que
la venue du prophète Muhammad est annoncée dés le temps des anciens rois
hébreux. Ainsi, Le conte exploite une « légende » courante dans la littérature
arabo-musulmane : c’est le thème de la prophétie dissimulée. (
cf. plus haut le passage l’entrée dans Bulûqiyyâ).
Dés le début du récit on apprend qu’un roi
hébreu avait découvert l’annonce de la prophétie de Muhammad dans la Thora mais
l’avait cachée. A sa mort, son fils découvre dans un coffret un écrit où est
décrite la venue du prophète de l’islam. C’est ainsi que Bulûqiyyâ se lance dans
une quête : rencontrer le prophète pour lequel il éprouve une passion. Il va
entreprendre un long voyage.
C’est ce périple que nous allons explorer. Nous
ferons une lecture linéaire du récit et nous nous arréterons sur les passages
les plus « significatifs ». Nous avons sélectionnés un certains nombres de
passages
I) Le voyage terrestre et
maritime :
Le Caire ®
île des serpents de l’enfer ®
île de la reine des serpents ®
Jérusalem, rencontre de ‘Uffan ®
île de la reine des serpents ®
franchissement des sept mers ®
montagne d’émeraude, grotte de Salomon, mort de
‘Uffan, apparition de Gabriel.
|
-
A)
L’île des serpents de l’enfer : C’est la première étape :
Sur cette île, des
serpents de la corpulence d'un chameau et de la taille d'un palmier
invoquaient Dieu, qu'Il est Puissant et Grand, et priaient pour
Muhammad, que la prière et le salut de Dieu soient sur lui. Ils
faisaient leurs invocations et leurs louanges à haute voix. Bulûqiyyâ
fut émerveillé par ce spectacle.
Et l'aube chassant
la nuit, Shahrâzâd dut interrompre son récit.
Lorsque ce fut la
quatre cent quatre-vingt-septième nuit, elle dit :
On raconte encore,
Sire, ô roi bienheureux, que Bulûqiyyâ fut extrêmement étonné d'entendre
les serpents glorifier Dieu et chanter Ses louanges. De leur côté, les
serpents aperçurent le jeune homme et s'assemblèrent autour de lui.
L'un d'eux lui demanda qui il était, d'où il venait, où il allait et
quel était son nom.
- Je me nomme
Bulûqiyyâ, répondit-il, et j'appartiens aux Banû Isrâ'îl. J'ai quitté
mon pays par amour pour Muhammad, que la prière et le salut soient sur
lui. Et me voici à sa recherche. Mais dites-moi à votre tour qui vous
êtes, nobles créatures.
- Nous habitons
l'enfer. Dieu le Très Haut nous a créés pour châtier les impies.
- Et qui vous a
amenés en ce lieu?
- Sache que
l'enfer bouillonne à ce point qu'il lui faut respirer deux fois par an,
une fois l'hiver et une
fois l'été. Toute
la chaleur du monde vient de
ces
exhalaisons. Lorsque l'enfer souffle, nous sommes
rejetés
de
son
ventre et lorsqu
'il
inspire,
nous y revenons.
- Existe-t-il en
enfer des créatures plus grandes vous ?
- Nous n'en
sortons avec son souffle que parce
que
nous sommes de
petite taille.
Il s'y trouve des
serpents , si grands qu'ils ne s'apercevraient pas de la présence du
plus grand d'entre nous dans
ses narines.
- Je vous entends
invoquer Dieu et prier
sur
Muhammad.
D'où connaissez-vous ce dernier?
-
Son nom est gravé sur la porte de l'enfer. Sans
lui, Dieu
n'aurait créé ni les créatures, ni le paradis
ni
les enfers, ni
les cieux et la terre, car Dieu n'a créé tout;
ce qui existe que pour Muhammad,
joignant ainsi en tout lieu Son nom à celui du
Prophète.
Aussi aimons nous Muhammad. |
Exploration :
-
Comparaison entre la symbolique du serpent dans la
littérature du Moyen Age occidental ( exemple choisi : Yvain ou le Chevalier au
Lion, de Chrétien de Troyes)et la littérature du Moyen Age arabo-musulman ( Le
conte De Hassib et la Reine des serpents). Pour ce faire on s’appuiera sur
l’article Serpent dans Le Dictionnaire des symboles, sous
la direction de Chevalier (J) & Gheerbrant (A), nouvelle édition revue et
corrigée. Paris, Robert Laffont, 1989. Coll. Bouquin
-
Evocation de l’enfer puisque ces serpents y demeurent.
(on étudiera avec les élèves de façon plus détaillée ce thème un peu plus loin)
B) Jérusalem, rencontre de ‘Uffan :
Après cela,
Bulûqiyyâ me fit ses adieux, reprit sa place à bord et navigua jusqu'à
Jérusalem. Il y avait en cette ville un homme qui possédait tous les
savoirs, maître en géométrie, en astronomie, en mathématiques, en
physiognomonie et en magie noire. Il lisait la Thora,
les Evangiles, les Psaumes et les
rouleaux d'Abraham. Il se nommait 'Uffân. II avait trouvé dans
un de ses livres que quiconque porterait l'anneau de Salomon
se verrait obéi par les hommes, les Génies, les oiseaux, les bêtes
sauvages et toute créature vivante. II avait aussi lu qu'après sa mort
on avait mis Salomon dans un cercueil et qu'on avait traversé sept mers
avant de le déposer là où il reposait. L'anneau était toujours à son
doigt et nul, homme ou Génie, ne pouvait le prendre. Aucun bateau non
plus ne pouvait parvenir à l'endroit où il se trouvait.
Et l'aube chassant
la nuit, Shahrâzâd dut interrompre son récit.
Lorsque ce fut la
quatre cent quatre-vingt-huitième nuit, elle dit :
On raconte encore,
Sire, ô roi bienheureux, que 'Uffân avait appris dans un livre que nul,
homme ou démon, ne pouvait s'emparer de l'anneau que notre seigneur
Salomon portait au doigt. Il avait appris aussi qu'aucun bateau ne
pouvait franchir les sept mers qui entouraient son lit de mort. Mais il
avait découvert
dans un autre
livre qu'il existait une herbe dont jlfallait extraire le suc pour en
oindre ses pieds et marcher sur les flots créés par Dieu Tout-Puissant
sans même se mouiller. Mais nul ne pouvait cueillir cette herbe s'il
n'était accompagné par la Reine des serpents.
Lorsque Bulûqiyyâ
entra à Jérusalem, il choisit un endroit pour faire ses prières. C'est
alors que 'Uffân vint à passer près de lui et lui adressa un salut
auquel Bulûqiyyâ répondit. 'Uffân le considéra attentivement et
s'aperçut que ce jeune homme assis était en train du lire la Thora. Il
s'approcha de lui et dit :
- Jeune homme,
quel est ton nom ? D'où viens-tu et où vas-tu ?
- Je me nomme
Bulûqiyyâ, je suis de la ville de Misr et j'ai pris la route pour
essayer de rencontrer Muhammad, que les prières et le salut soient sur
lui.
- Accompagne-moi
donc, je voudrais te recevoir chez moi.
- Bien volontiers.
'Uffân le prit par
la main, l'emmena chez lui et le traita avec une très grande générosité,
après quoi il lui demanda :
- Frère, dis-moi
maintenant comment tu as eu connaissance de Muhammad, les prières et le
salut soient sur lui, au point d'éprouver pour lui un pareil amour et de
partir à sa quête ? Qui donc t'a indiqué la route que tu as suivie
jusqu'ici ?
Bulûqiyyâ lui
raconta toute son histoire qui émerveilla 'Uffân et faillit lui faire
perdre la raison d'espérance ;
- Si tu me conduis
à la Reine des serpents, je te conduirai moi à Muhammad. La mission du
Prophète est encore lointaine. Si nous nous emparons de la Reine des
serpents, nous l'enfermerons dans une cage,
puis nous nous
transporterons dans les montagnes où poussent certaines herbes. Comme la
reine sera avec nous, chaque herbe près de laquelle nous passerons se
mettra à parler. Chacune, grâce à Dieu Tout-Puissant, décrira ses
vertus. J'ai appris dans mes livres l'existence d'une herbe
particulière. Quiconque la cueille, la hache menu, en extrait un suc
dont il enduit ses pieds, peut marcher sur toute mer créée par le
Seigneur ToutPuissant sans même mouiller ses talons. Si nous nous
emparons de la Reine des serpents, elle nous indiquera le lieu où pousse
cette herbe. Dès que nous en trouverons, nous la cueillerons, nous la
hacherons menu pour en extraire le suc. Après avoir libéré la reine,
nous enduirons nos pieds, franchirons les sept mers et arriverons au
lieu où repose notre seigneur Salomon. Nous retirerons l'anneau de son
doigt et mettrons son pouvoir au service de nos desseins. Après cela,
nous traverserons la mer des Ténèbres et parviendrons à l'eau de
jouvence. Ainsi Dieu nous fera vivre jusqu'à la fin des temps et nous
pourrons rencontrer Muhammad.
|
Exploitation :
1) La troisième étape du voyage de Buluqiyyâ le
conduit à Jérusalem. C’est dans cette ville qu’il fait la rencontre du prsonnage
de 'Uffân. On commence par voir les informations que le texte nous livre.
- C’est un homme
familiers des livres saints : Thora, Evangiles, Psaumes.
C’est aussi un savant qui « possédait tous
les savoirs, maître en géométrie, en astronomie, en mathématiques, en
physiognomonie et en magie noire. »
- « Il avait trouvé dans un de ses livres que
quiconque porterait l'anneau de Salomon se verrait obéi par les
hommes, les Génies, les oiseaux, les bêtes sauvages et toute créature vivante ».
- 'Uffân a le projet de s’emparer de
cet anneau. Cependant aucun moyen humain ne lui permet d’atteindre son but. Sa
connaissance des livres lui a donné la solution : «il
avait découvert dans un autre livre
qu'il existait une herbe dont il fallait extraire le suc pour en oindre ses
pieds et marcher sur les flots créés par Dieu Tout-Puissant sans même se
mouiller. Mais nul ne pouvait cueillir cette herbe s'il n'était accompagné par
la Reine des serpents. »
- Un pacte est scellé entre Buluqiyyâ et 'Uffân : « Si
tu me conduis à la Reine des serpents, je te conduirai moi à Muhammad.
La mission du Prophète est encore lointaine. (…)
Si nous nous emparons de la Reine des
serpents, elle nous indiquera le lieu où pousse cette herbe. Dès que nous en
trouverons, nous la cueillerons, nous la hacherons menu pour en extraire le
suc. Après avoir libéré la reine, nous enduirons nos pieds, franchirons les sept
mers et arriverons au lieu où repose notre seigneur Salomon. Nous retirerons
l'anneau de son doigt et mettrons son pouvoir au service de nos desseins.
Après cela, nous traverserons la mer des Ténèbres et parviendrons à l'eau de
jouvence. Ainsi Dieu nous fera vivre jusqu'à la fin des temps et nous pourrons
rencontrer Muhammad. »
Ainsi pour Buluqiyyâ la quête de
l’anneau de Salomon devient le moyen ultime pour se joindre à Muhammad.
2) Le texte des Mille et Une Nuits mélange à la fois les références religieuses
et l’étrange voire le merveilleux ( voir ici les références par exemple à
l’herbe magique dont le suc permet de marcher sur l’eau, de franchir les septs
mers, ou bien encore à l’eau de jouvence qui procure l’immortalité , les
pouvoirs de l’anneau de salomon)
3) Le
passage indique clairement que l’islam en tant que religion monothéiste fait
références aux écrits juifs et chrétiens. Pour ce faire nous lançons un travail
de recherche à effectuer par les élèves
·
Les
Evangiles
·
Les Psaumes
·
Les rouleaux
d'Abraham.
C)La grotte de Salomon, mort de ‘Uffan, apparition de
Gabriel.
- Dis-moi donc, alors, ce que devinrent 'Uffân et Buluqiyyâ après
t'avoir quittée. Ont-ils franchi les sept mers ? Sont-ils parvenus là
où repose notre seigneur Salomon ou non ? S'ils y sont parvenus, se
sont-ils emparés de son anneau ou non ?
- Sache, répondit la reine, que 'Uffân et
Bulûqiyyâ, après m'avoir quittée, enduisirent leurs pieds du suc de
cette herbe. Ils marchèrent sur les flots dont ils admirèrent les
merveilles. Ils allèrent de mer en mer
jusqu'à ce qu'ils en eussent franchi sept. Ils parvinrent à une immense
montagne haut dressée dans le ciel. Elle était faite d'émeraude, une
source y jaillissait et sa terre était de musc. Là ils laissèrent
éclater leur joie en se disant qu'ils étaient parvenus à leur but. Ils
s'avancèrent encore dans la montagne et virent de loin l'entrée d'une
caverne. Cette entrée était surmontée d'une immense coupole rayonnant de
lumière. Ils s'en approchèrent et y pénétrèrent. Un lit d'apparat était
dressé, fait d'or incrusté de pierreries. Tout autour étaient disposés
des sièges dont seul Dieu pouvait connaître le nombre. Ils virent le
seigneur Salomon étendu sur cette couche. II était revêtu d'une robe de
soie verte brodée d'or et brochée de gemmes les plus précieuses. Sa main
droite reposait sur sa poitrine. Il portait au doigt son anneau dont
l'éclat l'emportait sur celui des pierreries qui parsemaient ce lieu.
'Uffân apprit à
Bulûqiyyâ des incantations et des formules conjuratoires en lui disant
de les réciter sans s'arrêter un seul instant jusqu'à ce qu'il prenne
l'anneau. Puis il approcha du lit d'apparat. Mais à ce moment surgit de
dessous la couche royale un immense dragon qui poussa un rugissement
effrayant. Les lieux en furent ébranlés. Des étincelles jaillissaient
de la gueule du monstre qui dit à 'Uffân :
- Fuis ou tu périras!
Sans être troublé le
moins du monde, 'Uffân poursuivit ses incantations. Le dragon souffla
un jet de feu qui faillit enflammer les lieux et dit pour la seconde
fois :
-- Malheur à toi,
fuis ou tu périras!
En entendant ces mots, Bulûqiyyâ s'enfuit. Mais 'Uffân ne se troublait
toujours pas. Il s'avança vers le seigneur Salomon, tendit la main,
toucha l'anneau et
essaya de le retirer
du doigt. À ce moment, le dragon souffla et réduisit 'Uffân en cendres.
Quant à Bulûqiyyâ, il était tombé évanoui.
Et l'aube chassant la
nuit, Shahrâzâd dut interrompre son récit.
Lorsque ce fut la
quatre cent quatre-vingt-dixième nuit, elle dit :
On raconte encore, Sire, ô roi bienheureux, que Bulûqiyyâ,
voyant 'Uffân dévoré par les flammes et réduit à un tas de cendres,
s'évanouit. Dieu - que soit exaltée Sa majesté - ordonna à Gabriel de
descendre sur terre avant que le dragon souffle sur Bulûqiyyâ.
L'archange exécuta l'ordre rapidement. Il trouva 'Uffân brûlé par le
souffle du dragon et Bulûqiyyâ inanimé. Il alla au jeune homme, le tira
de son évanouissement, le salua et lui demanda les raisons de sa
présence en ce lieu. Bulûqiyyâ raconta toute son histoire du début
jusqu'à la fin et ajouta :
- Sache que je ne suis venu ici que pour Muhammad, la
prière et le salut de Dieu soient sur lui. 'Uffân m'avait informé que le
Prophète ne recevrait sa mission qu'à la fin des temps et que seuls
vivraient jusqu'à cette époque ceux qui auraient bu l'eau de jouvence.
On ne pouvait obtenir celle-ci que grâce à l'anneau de Salomon, que le
salut soit sur lui. Je l'ai donc accompagné ici et il est advenu ce
qu'il est advenu. Le voilà maintenant réduit en cendres tandis que je
suis vivant. Je voudrais que tu me dises où se trouve Muhammad.
- Il faut t'en
retourner, le temps de Muhammad est encore lointain.
Ayant dit ces mots, Gabriel s'éleva vers les cieux.
Bulûqiyyâ versa des larmes amères et eut bien des regrets de ce qu'il
avait fait.
|
Explotation :
1) Les deux hommes parviennent à exécuter leur
programme. Ils rejoignent l’endroit où repose le prophète Salomon.
On relève avec les élèves
-
la description des lieux :
o
« Ils
parvinrent à une immense montagne haut dressée dans le ciel. Elle était faite
d'émeraude, une source y jaillissait et sa terre était de musc. »
o
« Ils
s'avancèrent encore dans la montagne et virent de loin l'entrée d'une caverne. »
o
« Cette entrée était
surmontée d'une immense coupole rayonnant de lumière. »
o
Un lit d'apparat
était dressé, fait d'or incrusté de pierreries. Tout autour étaient disposés des
sièges dont seul Dieu pouvait connaître le nombre.
-
L’évocation de Salomon :
o
Ils virent le seigneur
Salomon étendu sur cette couche.
o
II était revêtu d'une
robe de soie verte brodée d'or et brochée de gemmes les plus précieuses.
o
Sa main droite
reposait sur sa poitrine.
o
Il portait au doigt
son anneau dont l'éclat l'emportait sur celui des pierreries qui parsemaient ce
lieu.
2) Coran, Dits du Prophète , littérature et
intertextualité :
Selon
certaines sources arabes, le tombeau de Salomon a été évoqué par le prophète
Muhammad. C’est ce que rappelle Jamel Eddine Bencheikh. Nous reproduisons
ici une page de son étude :
Il semblerait que le premier texte à mentionner ‘Uffân
et Bulûqiyyâ soit la traduction persane d'un texte arabe. Il s'agit de
l'adaptation abrégée faite par al-Bahamî (m. en 363/974) du
Tâ'rîkh d'at-Tabarî'. (Traduction
Zotenberg, Paris, réédition de 1984, t.
I, De la création à
David, p.
64.)
Parmi les questions posées à Muhammad par les juifs
figure celle qui a trait au tombeau de Salomon. Nous reproduisons
in extenso
la réponse
du Prophète :
« Le tombeau de mon frère Salomon est au milieu d'une mer qui fait
partie de la grande mer, dans un palais creusé dans le roc. Ce palais
renferme un trône, sur lequel on a placé Salomon dans la même attitude
qu'il avait pendant son règne; l'anneau royal est toujours à son doigt,
tellement qu'on dirait que Salomon est encore en vie. Dans cette île
sont douze gardiens qui gardent Salomon nuit et jour. Aucune créature
humaine ne peut arriver à l'endroit où est le tombeau de ce prince,
parce que, pour y arriver, il faudrait rester deux mois dans la mer. On
dit aussi que, depuis la mort de Salomon, aucune créature ne parvint
jusqu'à son tombeau, excepté deux personnes, dont l'une était Offân et
l'autre Beloukyâ.
« On dit qu'Offân
était allé à la recherche de l'anneau de Salomon, et qu'il avait pris
Beloukyâ pour compagnon de voyage. Ils partirent, et ils arrivèrent,
avec des peines infinies, à l'endroit dont nous avons parlé. Ensuite,
lorsque Offân voulut enlever l'anneau du doigt de Salomon, la foudre
tomba sur lui par la toute-puissance de Dieu, et le consuma.
« Beloukyâ revint
sur ses pas et fit connaître cet événement. » |
Bien que cela ne soit pas toujours aisé, notre
objectif est d’amener nos élèves à percevoir que aussi bien le Coran
que les Dits du prophète ont largement inspiré et influencé ce
récit des Mille et Une nuits. Ils fonctionnent comme générateurs
et comme référents culturels. En ce sens ils jouent le même rôle que La
Bible qui a largement influencé et inspiré la littérature occidentale.
Le rapprochement
entre le passage cité par Jamel Eddine Bencheikh et texte du conte est
édifiant : tout en restant « fidèle » à la source ( le dît du prophète), le
conteur amplifie et ajoute des élèments :
o
Le dragon gardien du tombeau
o
‘Uffan qui périt dans les flammes du dragon
o
l’intervention de l’Ange gabrien qui sauve
Buluqiyyâ
o
….
3) Le personnage de Salomon dans le Coran :
Références à Saloman d ans le coran : (quelques versets extraits de deux
sourates)
An-Naml
(Les
Fourmis)
Versets 15 à 44
15. Nous avons effectivement
donné à David et à Salomon une science; et ils dirent: ‹Louange à Allah
qui nous a favorisés à beaucoup de Ses serviteurs croyants›.
16. Et Salomon hérita de David
et dit: ‹Ô hommes ! On nous a appris le langage des oiseaux; et on nous
a donné part de toutes choses. C'est là vraiment la grâce évidente.
17. Et furent rassemblées pour
Salomon, ses armées de djinns, d'hommes et d'oiseaux, et furent placées
en rangs.
18. Quand ils arrivèrent à la
Vallée des Fourmis, une fourmi dit: ‹Ô fourmis, entrez dans vos
demeures, [de peur] que Salomon et ses armées ne vous écrasent [sous
leurs pieds] sans s'en rendre compte›.!
19. Il sourit, amusé par ses
propos et dit: ‹Permets-moi Seigneur, de rendre grâce pour le bienfait
dont Tu m'as comblé ainsi que mes père et mère, et que je fasse une
bonne oeuvre que tu agrées et fais-moi entrer, par Ta miséricorde, parmi
Tes serviteurs vertueux›.
20. Puis il passa en revue les
oiseaux et dit: ‹Pourquoi ne vois-je pas la huppe ? est-elle parmi les
absents ?
21. Je la châtierai sévèrement!
ou je l'égorgerai! ou bien elle m'apportera un argument explicite›.
22. Mais elle n'était restée
(absente) que peu de temps et dit: ‹J'ai appris ce que tu n'as point
appris; et je te rapporte de Sabaa› une nouvelle sûre:
23. J'ai trouvé qu'une femme
est leur reine, que de toute chose elle a été comblée et qu'elle a un
tròne magnifique.
24. Je l'ai trouvée, elle et
son peuple, se prosternant devant le soleil au lieu d'Allah. Le Diable
leur a embelli leurs actions, et les a détournés du droit chemin, et ils
ne sont pas bien guidés.
25. Que ne se prosternent-ils
devant Allah qui fait sortir ce qui est caché dans les cieux et la
terre, et qui sait ce que vous cachez et aussi ce que vous divulguez?
26. Allah! Point de divinité à
part Lui, le Seigneur du Tròne Immense.
27. Alors, Salomon dit: ‹Nous
allons voir si tu as dis la vérité ou si tu as menti.
28. Pars avec ma lettre que
voici; puis lance-la à eux; ensuite tiens-toi à l'écart d'eux pour voir
ce que sera leur réponse.
29. La reine dit: ‹Ô notables!
Une noble lettre m'a été lancée.
30. Elle vient de Salomon; et
c'est: ‹Au nom d'Allah, le Tout Miséricordieux, le Très Miséricordieux,
31. Ne soyez pas hautains avec
moi et venez à moi en toute soumission›.
32. Elle dit: ‹Ô notables!
Conseillez-moi sur cette affaire: je ne déciderai rien sans que vous ne
soyez présents (pour me conseiller)›.
33. Ils dirent: ‹Nous sommes
détenteurs d'une force et d'une puissance redoutable. Le commandement
cependant t'appartient. Regarde donc ce que tu veux ordonner›.
34. Elle dit: ‹En vérité, quand
les rois entrent dans une cité ils la corrompent, et font de ses
honorables citoyens des humiliés. Et c'est ainsi qu'ils agissent.
35. Moi, je vais leur envoyer
un présent, puis je verrai ce que les envoyés ramèneront›.
36. Puis, lorsque [la
délégation] arriva auprès de Salomon, celui-ci dit: ‹Est-ce avec des
biens que vous voulez m'aider? alors que ce qu'Allah m'a procuré est
meilleur que ce qu'Il vous a procuré. Mais c'est vous plutòt qui vous
réjouissez de votre cadeau.
37. Retourne vers eux. Nous
viendrons avec des armées contre lesquelles ils n'auront aucune
résistance. et nous les en expulserons tout humiliés et méprisés.
38. Il dit: ‹Ô notables! Qui de
vous m'apportera son tròne avant qu'ils ne viennent à moi soumis?›
39. Un djinn redoutable dit:
‹Je te l'apporterai avant que tu ne te lèves de ta place: pour cela. je
suis fort et digne de confiance›.
40. Quelqu'un qui avait une
connaissance du Livre dit: ‹Je te l'apporterai avant que tu n'aies
cligné de l'oeil›. Quand ensuite, Salomon a vu le tròne installé auprès
de lui, il dit: ‹Cela est de la grâce de mon Seigneur, pour m'éprouver
si je suis reconnaissant ou si je suis ingrat. Quiconque est
reconnaissant. c'est dans son propre intérêt qu'il le fait, et quiconque
est ingrat... alors mon Seigneur Se suffit à Lui- même et est Généreux›.
41. Et il dit [encore]:
‹Rendez-lui son tròne méconnaissable, nous verrons alors si elle sera
guidée ou si elle est du nombre de ceux qui ne sont pas guidés›.
42. Quand elle fut venue on lui
dit: ‹Est-ce que ton tròne est ainsi?› Elle dit: ‹C'est comme s'il
c'était›. - [Salomon dit]: ‹Le savoir nous a été donné avant elle; et
nous étions déjà soumis›.
43. Or, ce qu'elle adorait en
dehors d'Allah l'empêchait (d'être croyante) car elle faisait partie
d'un peuple mécréant.
44. On lui dit: ‹Entre dans le
palais›. Puis, quand elle le vit, elle le prit pour de l'eau profonde et
elle se découvrit les jambes. Alors, [Salomon] lui dit: ‹Ceci est un
palais pavé de cristal›. - Elle dit: ‹Seigneur, je me suis fait du tort
à moi- même: Je me soumets avec Salomon à Allah, Seigneur de l'univers›.
SabaSaba
12. Et à Salomon (Nous avons
assujetti) le vent, dont le parcours du matin équivaut à un mois (de
marche) et le parcours du soir, un mois aussi. Et pour lui nous avons
fait couler la source de cuivre. Et parmi les djinns il y en a qui
travaillaient sous ses ordres, par permission de son Seigneur. Quiconque
d'entre eux, cependant, déviait de Notre ordre, Nous lui faisions goûter
le châtiment de la fournaise.
13. Ils exécutaient pour lui ce
qu'il voulait: sanctuaires, statues, plateaux comme des bassin et
marmites bien ancrées. ‹Ô famille de David, oeuvrez par gratitude›,
alors qu'il y a peu de Mes serviteurs qui sont reconnaissants.
14.
Puis, quand Nous décidâmes sa mort, il n'y eut pour les avertir de sa
mort que ‹la bête de terre›, qui rongea sa canne. Puis lorsqu'il
s'écroula, il apparut de toute évidence aux djinns que s'ils savaient
vraiment l'inconnu, ils ne seraient pas restés dans le supplice
humiliant [de la servitude]. |
Pour aller plus loin :
Nous nous sommes appuyés Sur un article de l’encyclopédie Hachette.
Salomon
© Hachette Livre et/ou Hachette Multimédia
Troisième roi d'
Israël. Salomon en hébreu Shelomo. Fils de Bethsabée et de David,
qui le fit sacrer de son vivant, il monta sur le trône vers 970.
Ses alliances
avec le pharaon Siamon, dont il avait épousé la fille, et avec
Hiram I
er
de Tyr
, contribuèrent au maintien de la paix, qui
caractérisa son règne. Il s'attacha à restructurer le royaume d'Israël
en substituant aux divisions tribales un système de provinces dont
Jérusalem fut la capitale.
Son œuvre
architecturale fut également importante. Il fit venir de Phénicie bois
et métaux pour bâtir le Temple et le palais royal de Jérusalem,
construire et équiper une flotte sur la mer Rouge; il fit exploiter les
mines du Néguev et créa les fonderies d'Ezion Géber. Cependant, son
centralisme et la lourde fiscalité nécessaire à la construction du
temple de Jérusalem, notamment, suscitèrent de vives oppositions qui
aboutirent, après sa mort, au schisme du royaume. Les tribus du Nord se
séparèrent de Juda et de Benjamin pour fonder le royaume d'Israël
(capitale Samarie). La construction et la consécration du Temple
scellèrent l'alliance de Yahvé et de la caste de David (I Rois: 8-9).
Dès
l'Antiquité, Salomon a joui d'une réputation de grande sagesse,
illustrée par l'épisode biblique du célèbre jugement (I Rois, III, 16) :
deux femmes affirmant être la mère d'un même enfant, Salomon ordonna
qu'on le coupât en deux afin d'en donner une moitié à chacune d'elles;
la femme qui refusa ce partage était bien entendu la vraie mère. La
réputation de sagesse du souverain impressionna fortement la reine de
Saba, lorsqu'elle lui rendit visite; de la liaison qu'il aurait eue avec
cette reine, serait né un fils, Ménélik I
er , ancêtre
légendaire de la dynastie éthiopienne, dite salomonide.
Auteur d'une œuvre poétique assez importante (psaumes), Salomon s'est
vu attribuer à titre apocryphe quelques livres de l'Ancien Testament:
Proverbes, Ecclésiaste, Sagesse, Cantique des Cantiques.
|
Etude de deux tableaux :
-
Nicolas Poussin. Le jugement de Salomon. 1649. Louvre, Paris,
France
Deux prostituées se présentèrent à Salomon pour revendiquer
un enfant Salomon se fit alors donner une épée et proposa de couper l’enfant en
deux pour que chaque femme ait une moitié; mue par son amour maternel, la vraie
mère accepta que son enfant soit confié à l’autre pourvu qu’il reste en vie,
Salomon put de la sorte démasquer l’imposteur
Valentin de BOULOGNE, dit LE
VALENTIN
Coulommiers
(Seine-et-Marne), 1591 - Rome, 1632
Le Jugement de Salomon
Vers 1625
H. : 1,76 m. ; L. :
2,10 m.
Devant reconnaître la mère d'un enfant que deux femmes se disputaient, le roi
Salomon ordonna de le couper en deux et d'en donner la moitié à chacune. Salomon
vit ainsi en celle qui y renonça la vraie mère.
suite
Nous renvoyons ici à l’étude de Pierre-Marie Baude, Bible,
littérature et intertextualité in Enseignement,
littérature et religion , collection "Histoire des religions -
cultures et religions" co-éditée par Le Centre Régional de
Documentation Pédagogique de FRANCHE-COMTE et Desclée de Brouwer, 2000.
Nous avons évoqué aussi
cette notion de Bible et intertextualité dans le parcours consacré à
Yvain ou le Chevalier au Lion de Chrétien de Troyes.
| |
|