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Texte d’étude (p. 317_3120)
Pendant tout ce temps, Hâsib pleurait et
sanglotait. Il était assis là dans un triste état, lorsqu'il vit un gros
scorpion. Il se leva et le tua. Puis il se mit à réfléchir et se dit : «
Cette fosse était remplie de miel. D'où venait donc ce scorpion ? »
Cherchant d'où avait pu venir la bête, il examina les parois de tous
côtés et finit par apercevoir une ouverture minuscule par où filtrait
de la lumière. À coup sûr, c'est de là que venait u scorpion. II se
saisit de son couteau et se prit à élargir l'ouverture jusqu'aux
dimensions d'une fenêtre. sortit ainsi de la fosse et marcha un moment
dans le souterrain de grande dimension. Il arriva à une porte colossale
forgée dans un fer de couleur noire. Elle était munie d'une serrure
d'argent et d'une clé d'or. Le jeune homme s'avança et regarda par le
trou de la serrure Une lumière très vive lui semblait provenir de
derrière cette porte qu'il ouvrit à l'aide de la clé. Il franchit le
seuil et marcha un long moment jusqu'à un immense lac. Quelque chose sur
ce lac miroitait comme peuvent: miroiter des eaux. Il ne cessa d'avancer
jusqu'à ce qu'il arrive à la source du miroitement. II s'agissait d'un
tertre de topaze verte, surmonté d'un lit d'apparat d'or incrusté de
pierreries.
Et l'aube chassant la nuit, Shahrâzâd dut
interrompre son récit.
Lorsque ce fut la quatre cent
quatre-vingt-cinquième nuit, elle dit :
On raconte encore, Sire, ô roi bienheureux, qu'en
arrivant au tertre, Hâsib Karîm ad-Dîn constata qu'il était de topaze
verte. Un lit d'apparat d'or incrusté de pierreries y était dressé. Tout
autour de ce lit étaient disposés des sièges, certains faits d'or,
d'autres d'argent et d'autres enfin d'émeraude. Hâsib les regarda et
poussa un soupir. Il les compta et vit qu'ils étaient au nombre de douze
mille. Il monta sur le lit d'apparat, s'y assit et contempla avec
étonnement le lac et les rangs de sièges. Il fut bientôt pris par le
sommeil et s'endormit pendant un moment. Réveillé par des soufflements,
des sifflements et un énorme tumulte, il ouvrit les veux et se redressa
sur son séant pour s’apercevoir que les sièges étaient occupés par des
serpents d'une taille monstrueuse. Chacun ne mesurait pas moins de cent
coudées.
Hâsib fut saisi d'une terrible frayeur. Sa bouche
se dessécha de peur et il désespéra de la vie. L'œil de chaque serpent
brûlait comme une braise. Le jeune homme tourna ses regards vers les
eaux du lac et les vit recouvertes de petits serpents dont seul Dieu le
Très Haut connaissait le nombre. A ce moment-là, un serpent de la taille
d'un mulet se dirigea vers lui. Il portait sur le dos un plateau d'or au
centre duquel se tenait un serpent aussi resplendissant qu’un cristal.
Il avait un visage humain et parlait une langue arabe des plus pures.
Lorsqu'il fut arrivé à proximité, il salua Hâsib qui lui rendit son
salut. L'un des serpents assis sur les sièges se leva alors, alla
jusqu'au plateau d'or, prit la créature qui s'y tenait et l'installa sur
un siège. Sur un ordre de celle qui semblait être leur souveraine, les
serpents se jetèrent à terre pour lui donner les marques de leur
obéissance et prier pour elle. Elle leur -permit de se relever puis
adressa ces mots à Hâsib :
- N'aie point peur de nous, jeune homme. Je suis la
Reine des serpents et leur princesse.
En entendant ces paroles, Hâsib se sentit rassuré.
La reine fit signe que l'on servît une collation. On apporta des pommes,
du raisin, des grenades, des pistaches, des noisettes, des noix, des
amandes, des bananes, et l'on disposa tout cela devant Hâsib.
- Sois le bienvenu, dit la reine. Quel est ton nom
? - Hâsib Karîm ad-Dîn.
- Mange donc de ces fruits. Nous n'avons pas
d'autre nourriture ici et tu ne dois rien craindre de nous.
Hâsib mangea à sa suffisance et loua le Dieu Très
Haut. On desservit alors la table et la Reine des
serpents pria son hôte de lui dire de quel pays il
était comment il était parvenu en ces lieux, et ce qui lui était_
arrivé.
….
- Telle est mon histoire, dit-il, du début jusqu'à
la fin. Dieu est seul à savoir ce qui va m'advenir maintenant.
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Exploration :
- Le conte marqué par une certaine tradition orale permet
aux auditeurs de garder le fil du récit. C’est ainsi que « Hâsib
narra l'histoire de son père et de sa propre aventure. Il raconta comment il
était né, comment il avait été envoyé à l'école à l'âge de cinq ans sans rien y
apprendre, comment il avait été ensuite placé en apprentissage sans plus de
succès, comment sa mère lui avait alors acheté un âne pour être bûcheron comment
il avait trouvé un puits de miel, comment ses compagnons l'avaient abandonné
dans le puits et s'en étaient allés, comment un scorpion était apparu près de
lui, comment il l'avait tué puis avait élargi l'ouverture par laquelle était
descendue cette bête, comment il s'y était glissé, avait trouvé le portail de
fer, l'avait ouvert pour arriver en ce lieu où il parlait à la Reine des
serpents »
.
- Le passage dans l’Autre Monde :
On fera observer aux élèves que Hasib arrive dans
L’Autre Monde après avoir été abondonné par ses compagnons bûcherons au
fond d’une fosse. Pour s’échapper, il élargit le passage par lequel s’est glissé
un scorpion et là il se trouve dans un monde autre !
Ici l’autre monde est situé sous terre. Le personnage s’est
enfoncé au cœur de la terre.
On fera un parallèle avec Yvain ou le Chevalier au
lion : dans le roman de Chrétien de Troyes l’Autre Monde est situé de
l’autre côte de l’eau et la fontaine magique en était la porte d’accès.
- Les attributs de l’Autre Monde :
-
On rendra les élèves sensibles à tous les élèments qui
caractérisent le lieu dans lequel arrive Hassib :
-
le souterrain de grande dimension
-
une porte colossale forgée dans un fer de couleur noire
munie d'une serrure d'argent et d'une clé d'or
-
la lumière très vive
-
un immense lac
-
la source du miroitement. II s'agissait d'un tertre de
topaze verte, surmonté d'un lit d'apparat d'or incrusté de pierreries.
-
Tout autour de ce lit étaient disposés des sièges,
certains faits d'or, d'autres d'argent et d'autres enfin d'émeraude. Ils
etaient au nombre de douze mille.
- On observera en outre l’aspect des habitants :
-
des serpents d'une taille monstrueuse. Chacun ne mesurait
pas moins de cent coudées.
-
L'œil de chaque serpent brûlait comme une braise
-
un serpent de la taille d'un mulet portait sur le dos un
plateau d'or au centre duquel se tenait un serpent aussi resplendissant qu’un
cristal. Il avait un visage humain et parlait une langue arabe des plus pures.
(on remarquera ici que ce serpent a un visage humain et parle le langage des
hommes, ici la langue arabe, la langue du conte)
-
Hasib semble rassuré par la Reine des serpents qui n’est
pas perçue par lui comme une créature maléfique.
- On fera remarquer qu’il faudra attendre la suite du récit
(l’histoire de Bulûqiyyâ racontée par la Reine des serpents à
Hassib) pour savoir qui sont ces êtres étranges.
Travail de synthèse :
Une recherche sur la symbolique du serpent et du dragon
dans les traditions occidentales et dans les traditions orientales. (On a déjà
abordé en partie la symbolique du serpent lors de notre travail sur Yvain
ou le Chevalier au lion de Chrétien de Troyes)
suite
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